Éclats de voyage

Il porte aux yeux un souvenir dʼenfance, un poids dʼombre et de fraîcheur, grave, rieur, généreux. Il égrène des évidences, sʼapproprie lʼespace, chuchote, ensorcelle le regard, sincère.

Il dessine sa dérive avec des mots du quotidien. Sa solitude suffit à encombrer ses 80 m2 dʼatelier. Il travaille assis, et la surface de son bureau rassemble tous les éléments de ses voyages. Il y tisse le quotidien et le rêve, des journées entières, refuse lʼindicible, à fleur de peau, à fleur de cœur, main rude et douce, jubilations de gestes minutieux et rapides dérobés à l’angoisse, désir joyeux.

Il occupe l’espace, il joue avec le vide, et brutalise le regard en parcours de tourbillons, farandoles, logique et fantaisie. Le bruissement prend alors des épaisseurs imprévisibles, magiques, puissantes. En petits gestes tendres, sa manière à lui de briser le silence…

… un jour, le bruit de la Peinture qui n’était plus qu’un faible tintement…

Le désir de peindre répond à un appel, pouvant passer du murmure au fracas, au silence même. Pour travailler, il sʼimmerge dans un espace poétique de musique, de peintures, et à partir d’une phrase, d’une image, d’une photographie, mûri, porté comme dans le travail du rêve, sorte de nourriture intérieure, commence le dialogue entre lui et la peinture, la tache et le trait. Peindre, bien au-delà de son atelier, il ne se situe pas dans les limites d’une mode. Il est peintre de la nécessité et de lʼauthentique. Pour lui, la peinture est une langue comme la musique, sa peinture ne se perçoit pas comme un discours mais une émotion et en intelligence avec le visible.

Louis-Georges Verwaerde – 1990